Les Menaces Sécuritaires aux Investissements en Afrique: Un Obstacle à la Croissance Économique Durable
- Alioune Aboutalib Lô

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Introduction
L’Afrique, riche en ressources naturelles et dotée d’un potentiel de croissance considérable, attire de plus en plus l’attention des investisseurs internationaux. Toutefois, ce dynamisme est freiné par des risques sécuritaires multiformes, allant du terrorisme à l’instabilité politique, en passant par les conflits communautaires et la criminalité transnationale. Ces menaces, souvent structurelles, impactent négativement la confiance des investisseurs, augmentent le coût du capital et compromettent la viabilité des projets économiques à long terme.
1. L’Insécurité Politique et İnstitutionnelle
La fragilité institutionnelle et les transitions politiques non démocratiques demeurent des sources majeures d’insécurité pour les investissements. Les coups d’État récurrents dans des pays comme le Mali, le Burkina Faso, ou le Niger témoignent de l’instabilité des régimes et de la faiblesse de l’État de droit. L’incertitude juridique liée aux changements de régime peut entraîner la remise en cause des contrats, l’expropriation ou la nationalisation des actifs, ou encore la révision arbitraire des politiques fiscales.
Selon la Banque mondiale (2023), les pays classés comme ayant un « faible contrôle de la corruption » et une « faible stabilité politique » attirent en moyenne 30 % de moins d’investissements directs étrangers (IDE) que les pays mieux gouvernés en Afrique.

2. Le Terrorisme et Les Conflits Armés
Le terrorisme constitue une menace sécuritaire directe pour les entreprises, les infrastructures et les chaînes logistiques. Le Sahel est devenu l’épicentre d’une insécurité croissante, avec des groupes tels que le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM) et l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) menaçant les corridors économiques. Les attaques contre des convois miniers ou des travailleurs étrangers (notamment au Burkina Faso et au Niger) illustrent le lien direct entre terrorisme et climat d’affaires dégradé.
Selon l’African Center for Strategic Studies (2024), les violences liées à l’extrémisme violent ont triplé au Sahel depuis 2019, et cette insécurité pousse plusieurs compagnies minières canadiennes et australiennes à suspendre ou réviser leurs opérations dans la région.
3. Les Conflits İntercommunautaires et Les Tensions Ethniques
Certains conflits prennent racine dans la compétition pour le contrôle des ressources naturelles (terre, eau, pâturages, mines). Ces conflits, souvent instrumentalisés politiquement, déstabilisent des zones entières. Dans des pays comme le Nigeria, les affrontements entre agriculteurs et éleveurs, exacerbés par le changement climatique et l’urbanisation, ont provoqué des milliers de morts et entraîné des déplacements massifs de population.
Ces conflits réduisent l’accès sécurisé au foncier, perturbent les activités agricoles et industrielles, et rendent incertaine toute planification à moyen et long terme. Le Forum économique mondial (2022) souligne que l’insécurité foncière en Afrique constitue un obstacle majeur à l’investissement dans le secteur agro-industriel.
4. Criminalité Transnationale et Piraterie
Le golfe de Guinée reste une des zones maritimes les plus dangereuses au monde pour le transport maritime, affectant les importations, les exportations, et les investissements dans les ports et infrastructures logistiques. Bien que le nombre d’attaques ait légèrement diminué, la piraterie reste une menace sérieuse, avec des enlèvements contre rançon fréquents.
En parallèle, les trafics illicites (drogue, armes, êtres humains) alimentent les réseaux criminels et sapent les institutions étatiques. Ces flux illicites créent un environnement d’affaires parallèle, faussent la concurrence et accroissent le coût du respect des normes légales pour les entreprises formelles.
5. Cybermenaces et Sécurité Numérique
La transformation numérique rapide en Afrique s’accompagne d’une augmentation significative des cyberattaques, en particulier dans les secteurs bancaire, énergétique et des télécommunications. Le déficit de régulation, la faiblesse des systèmes de cybersécurité et l’essor des fintechs vulnérables accroissent le risque pour les investisseurs.
Selon Interpol (2022), l’Afrique a enregistré une hausse de plus de 200 % des cyberattaques en trois ans. Le piratage des données financières ou l’interruption de services numériques sont des risques de plus en plus pris en compte dans les due diligences des investisseurs.

6. Instabilité Sociale et Mouvements Protestataires
Les mouvements sociaux (grèves, manifestations, émeutes) liés à des revendications économiques, politiques ou identitaires perturbent souvent les activités économiques. La hausse des prix, le chômage massif des jeunes et la faiblesse des services publics alimentent un climat social explosif. Les investisseurs dans les secteurs de l’énergie, des transports ou des mines sont particulièrement exposés à ces interruptions.
Par exemple, au Sénégal en 2021 et 2023, les émeutes politiques ont causé des pertes estimées à plusieurs dizaines de millions de dollars aux entreprises privées (Jeune Afrique, 2023). Dans plusieurs cas, ces troubles peuvent aussi déboucher sur des sabotages d’infrastructures ou des retraits d’entreprises étrangères.
7. Changements Climatiques et Sécurité Environnementale
Les risques liés au climat (sécheresses, inondations, désertification) ont des conséquences directes sur les infrastructures, l’agriculture, la sécurité alimentaire et les migrations internes. Ils alimentent l’instabilité sociale et aggravent les tensions autour des ressources.
La Banque africaine de développement (BAD, 2022) estime que les pertes économiques dues aux effets climatiques pourraient atteindre 7 à 9 % du PIB dans certains pays africains d’ici 2050 si des mesures d’adaptation ne sont pas mises en œuvre. Ces risques environnementaux affectent particulièrement les investissements dans l’agriculture, les énergies et les zones côtières.
8. Faiblesses des Systèmes Judiciaires et İnsécurité Juridique
Enfin, les menaces sécuritaires ne sont pas seulement physiques, mais aussi réglementaires. L’imprévisibilité des lois, la lenteur de la justice, et la corruption judiciaire dissuadent les investissements à long terme. De nombreux investisseurs se plaignent de la difficulté à faire respecter les contrats, à régler les litiges, ou à rapatrier les bénéfices.
La CNUCED (2023) souligne que plus de 65 % des litiges liés aux IDE en Afrique concernent des contentieux fiscaux ou des violations contractuelles, souvent dus à l’instabilité juridique ou à l’interventionnisme politique.

Conclusion
Les menaces sécuritaires sur les investissements en Afrique sont multiples, complexes et souvent interconnectées. Si l’Afrique offre des opportunités considérables, notamment dans les domaines des ressources naturelles, de l’énergie verte et des technologies, la sécurisation de l’environnement des affaires demeure une condition essentielle à la mobilisation de capitaux étrangers. Il appartient tant aux États africains qu’aux partenaires internationaux de développer des stratégies de gouvernance inclusive, de prévention des conflits, de professionnalisation des forces de sécurité et de renforcement de l’État de droit pour atténuer ces risques. Sans une stabilité durable, le potentiel économique africain restera partiellement inexploité.
Références
African Center for Strategic Studies. (2024). Extremist violence in Africa: Trends and responses. https://africacenter.org
Banque africaine de développement. (2022). Évaluation des risques climatiques en Afrique. Abidjan : BAD.
Banque mondiale. (2023). Worldwide Governance Indicators. https://info.worldbank.org/governance/wgi
CNUCED. (2023). World Investment Report: Investing in Sustainable Energy for All. Genève: Nations Unies.
Forum Économique Mondial. (2022). Global Risks Report 2022. Genève.
Interpol. (2022). Cybercrime in Africa: Threats and responses. Lyon: Interpol.
Jeune Afrique. (2023). Sénégal : le coût économique des émeutes politiques. https://www.jeuneafrique.com
OCDE. (2023). Investir dans des environnements fragiles : perspectives pour l’Afrique. Paris: OCDE.










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